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Qu'est ce que la guerre ?

roland
October 28, 2025
Updated October 28, 2025
Qu'est ce que la guerre ?

La recherche d’une définition de la guerre se heurte immédiatement à la multitude des points de vue. Si la guerre est souvent décrite comme une lutte entre des groupes humains, les divergences concernent les formes de cette lutte et les acteurs concernés. Certains définissent la guerre comme une lutte meurtrière, tandis que d'autres incluent d'autres finalités. Pour certains, la guerre est limitée aux États indépendants, tandis que d'autres l'étendent aux partis politiques et aux communautés organisées. Certains considèrent la guerre comme un recours collectif à la force, tandis que d'autres ne considèrent pas le caractère collectif comme un élément déterminant. Les définitions varient également en fonction du but de la guerre : victoire militaire, écrasement de l'adversaire, imposition de sa volonté, prédation... Enfin, certains définissent la guerre par les moyens employés, en particulier l'usage des armes mais cette condition n’est pas universelle. Ainsi, Rousseau, puisqu'il faut bien citer un ou deux auteurs classiques, propose une définition large de la guerre qui ne se limite pas à l'affrontement militaire : une "disposition mutuelle, constante et manifestée de détruire l'État ennemi, ou de l'affaiblir au moins par tous les moyens qu'on le peut". Clausewitz considère la guerre comme "la poursuite de la politique par d’autres moyens". Cette perspective souligne l'aspect politique de la guerre, avec une violence qui constitue un instrument au service d'objectifs politiques.

Dans le domaine du droit international, l’usage du terme « guerre » tend à se restreindre, au profit d’expressions telles que « emploi de la force », « de la force armée » ou « conflit armé ». Le droit international, notamment la Charte des Nations Unies, interdit en principe le recours à la force armée en dehors de certains cas exceptionnels, telles que la légitime défense ou en application d’une décision du Conseil de sécurité. Le droit international humanitaire se réfère principalement à la notion de « conflit armé », notion qui est au cœur de la classification des conflits en deux catégories : conflits armés internationaux et conflits armés non internationaux. Toutefois, cette distinction reste trop artificielle et peine à s’adapter à la complexité d’une réalité qui échappe à cette dichotomie. Enfin, la guerre reste essentiellement un phénomène évolutif, en permanente mutation pour trouver sa voie malgré les vaines tentatives de limitations dont elle fait l’objet.

Plutôt que de céder à la facilité de reprendre les définitions de la guerre formulées par des auteurs reconnus, qui n’ont de valeur que dans l’époque où elles ont été formulée, dès lors qu’il est admis que la guerre mute en permanence, repartons de notre grille de lecture initiale qui considère les groupes humains comme des forces, soudées par une volonté et animés par des idées, ce qui permet de caractériser trois niveaux d’affrontement : affrontement pour l’imposition d’idées (guerre de l’information), affrontement pour réduire la volonté (guerre d’influence), affrontement pour réduire les forces (guerre d’attrition). Partant de cette grille, la guerre se définit alors comme l’affrontement de groupes humains, de quelques natures qu’ils soient (Etats, Organisation Non Gouvernementale, Groupe Armé, Groupe Religieux, Parti Politique, …) dans le but d’affaiblir la cohésion, la volonté et/ou la force du groupe adverse. Cette définition ouvre des perspectives qui permettent de théoriser la guerre au-delà du cadre physique traditionnel, et de mieux prendre en compte sa dimension informationnelle, avec le cerveau humain comme champ de bataille, nous y reviendrons et une nouvelle perspective : les Français savent-ils seulement qu’on leur fait la guerre ? Mais avant de répondre à cette question, il convient de s’interroger sur la finalité et modalités de la guerre.

Ce triptyque idée-volonté-force permet de décrypter la position réelle des États impliqués dans un conflit, la configuration de ces trois composantes révélant la véritable nature de son engagement. Ainsi, un État en guerre dépourvu de volonté propre signale généralement son statut d'État mandataire ou "proxy". Dans ce cas, il agit comme l'instrument d'une puissance tierce qui l'utilise pour servir ses intérêts sans s'exposer directement. Cette configuration se manifeste souvent dans les guerres par procuration, où des puissances régionales ou mondiales s'affrontent indirectement à travers des acteurs locaux. De même, un État combattant pour des idées qui ne sont pas les siennes révèle également une forme de subordination. Cette situation se produit lorsqu'un État adopte des justifications idéologiques ou des narratifs imposés par d'autres puissances, masquant ainsi les véritables motifs du conflit. L'histoire récente offre de nombreux exemples où des États ont embrassé des causes qui ne correspondaient pas à leurs intérêts nationaux authentiques, mais servaient plutôt les objectifs de leurs alliés ou protecteurs. Enfin, un État qui s'engage dans un conflit porté uniquement par la force de ses convictions et de ses idées, mais sans disposer des moyens militaires, économiques ou diplomatiques nécessaires, se trouve dans une position particulièrement vulnérable. Cette configuration aboutit souvent à un échec stratégique, l'État se retrouvant dans l'incapacité de concrétiser ses ambitions faute de ressources suffisantes. Cette situation peut conduire à une défaite militaire, à l'épuisement économique, voire à l'effondrement du régime, comme l'histoire l'a maintes fois démontré. L'analyse de ces configurations souligne l'importance cruciale de l'alignement entre les idées, la volonté et les forces d'un État comme déterminant de sa capacité à mener une guerre de manière autonome et efficace. Un déséquilibre entre ces trois composantes révèle souvent des motivations cachées ou des influences externes qui déterminent la véritable nature de l'engagement d'un État dans un conflit. Un Etat qui ne parviendrait jamais à définir l’Etat final recherché de ses engagements, par exemple, pourrait raisonnablement soupçonner que ses forces sont au service d’une cause qui n’est pas la sienne.

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