L'acceptation inconditionnelle des choix techniques préétablis structure trop souvent la mentalité militaire. Cette soumission conduit à des efforts considérables de formation et d'adaptation plutôt qu'à la remise en question des outils eux-mêmes. Bill Gates affirmait confier systématiquement les tâches ardues aux paresseux, ceux-ci trouvant toujours l'optimum. Les forces armées inversent cette logique.
La persistance de tâches automatisables confiées à des individus illustre cette inefficacité. La séparation budgétaire entre recrutement et fonctionnement génère ces absurdités : les coûts d'acquisition de compétences et de formation, engagés au recrutement, encouragent la perpétuation de méthodes obsolètes. Cette rigidité compromet l'efficacité opérationnelle dans un monde où automatisation et technologie offrent des solutions supérieures.
L'analyse des problèmes militaires confronte décideurs et stratèges à l'intrication de multiples dimensions. Or PowerPoint, outil de présentation standard, impose la réduction de ces problèmes complexes en représentations bidimensionnelles : courbes, graphiques, schémas simplistes.
Cette compression détruit la richesse informationnelle. Les situations militaires exigent la prise en compte de variables interdépendantes et évolutives. Les contraintes temporelles et la nécessité de communication claire conduisent à une simplification excessive. Les graphiques révèlent des tendances, mais échouent à capturer la complexité réelle.
L'usage excessif de PowerPoint privilégie la forme sur le fond. La présentation visuelle domine l'analyse approfondie. Les décisions dépendent alors de la qualité cosmétique plutôt que de la pertinence stratégique. Cette dérive impose la reconnaissance des limites de l'outil et refuse le sacrifice de l'analyse pour la commodité de présentation.
Les principes de guerre, comme les axiomes mathématiques, définissent un domaine conceptuel et opérationnel. Cependant, leur immutabilité reste illusoire. Le théorème de Gödel révèle que tout système formel suffisamment complexe contient des énoncés indécidables. Cette limite s'applique aux doctrines militaires. Par extension, il signifie aussi que les axiomes qui définissent un système ne permettent pas de trancher sur sa pertinence, ce qui signifie entre autre que la conformité des concepts et doctrines aux principes de la guerre ne garantit en rien leur efficacité dans un contexte par nature évolutif. On s'en doutait mais l'appui de Goedel n'est pas inutile pour lutter contre les "talibans" des principes.
Les principes traditionnels — concentration des forces, économie des moyens — structurent la réflexion stratégique. Mais la cyber-guerre, les drones, l'intelligence artificielle bouleversent ces axiomes. Souvent, ces principes compensent les faiblesses psychologiques humaines — besoin de sécurité, aversion au risque — plutôt qu'ils n'exploitent les nouvelles capacités technologiques.
La révolution des systèmes d'information impose la réévaluation doctrinale. La concentration des forces perd sa pertinence face à la détection temps réel et au commandement fractionné. L'économie des forces requiert une réinterprétation au regard de l'optimisation algorithmique des ressources. La flexibilité et l'adaptabilité supplantent la rigidité doctrinale.
La cavalerie polonaise face aux panzers en 1940 incarne l'échec de l'adaptation. Cette tragédie rappelle l'obligation de rupture avec les méthodes héritées. Les militaires doivent reconquérir la définition de leur outil stratégique et cesser l'adaptation à des principes obsolètes.
La guerre moderne — multidimensionnelle, complexe, évolutive — exige l'abandon des conventions établies. L'exploration de voies nouvelles remplace l'application rigide de principes inadaptés. La compensation manuelle des insuffisances systémiques par PowerPoint et outils similaires doit cesser. Les systèmes d'information modernes et la collecte temps réel offrent des capacités analytiques supérieures.
La reprise en main stratégique requiert une approche réflexive, adaptative et novatrice. L'adaptation technologique, la remise en question doctrinale et la redéfinition des outils conditionnent la sécurité et le succès du XXIᵉ siècle. La guerre évolue constamment. Seuls les acteurs de rupture domineront les défis futurs.